la mort de Elie Delamare-Debouteville
Tu m’inspirais tous ces poèmes
que je n’aurais jamais tirés
ni de mon cœur ni du hasard
ni du pays de nulle part
puisque je revenais à toi
pour m’enivrer de ton odeur
de noyé dans son ammoniaque
surenchérissant de senteurs
d’orange verte et d’ambre grise
tu es mort sans te retourner
me laissant libérée d’aimer
au poids de ce fardeau énorme
de t’avoir vu vivre un instant
tout généreux en amitié
tout magnifique en dénuement
avec la gouaille d’un mendiant
déchu de sa race divine
comptant les anges à son plafond
dans son nid d’aigle sans aiglon
dans son campement de gitan
avec des poses de gisant
accroché à son auréole
en rond de fumée de gitane
de solitudes en cendrillons
accueillies chacune en princesse
… passent les jours et les gonzesses …
solitudes en mal de plaisir
cendrillons écartant leurs lèvres
réclamant pour dernier opium
pour se révéler d’avantages
tes doigts brunis de nicotine
ta bouche de mangeur de tripes
ta langue de broyeur de rêves
ton sexe désintéressé
et ton amour de vive voix
mordant à la perfection ronde
de tes seins enflés d’amertume
que tu m’offrais, comme une mère
donne à téter à son enfant,
je t’aimais sans penser à rien
ton ventre plein chauffant mes reins
confondant gésir et désir
empoignant la mort confondue
à ton étonnante caresse
la lune meurt en mal d’aurore
et je crois que tu bouges encore
entre mes entrailles écorchées
le présent a déjà passé