sanglante bécasse
Avant que Elie ne m’abandonne …
que sa volonté soit faite
lovée comme un serpent sous le drap du fantôme
qui suinte de pâleur aux rayons du matin
tournoyant son boulet pour tuer son chagrin
et dissiper les chairs, exploser les atomes,
neutraliser la vie qui cherche à l’incarner
et s’entremêle en vrilles de fleurs clématites
aux néants désolés où s’engouffre sa peur
[le relief de son chant plaintif et redoutable
retrace l’aventure au long cour qu’il raconte,
interminablement, tendu au ciel opaque
du rêve lancinant qu’il appelle son Dieu
qu’il tourne en cauchemar pour l’appeler Venise
qu’il sublime à jamais pour l’appeler Sophie
et dont il me rebat le cœur et les oreilles
selon qu’il flaire en moi un chien ou un ami]
j’ai mué lentement au cœur de sa racine
là où le mal sommeille à notre servitude
j’attends qu’il soit grand jour pour t’offrir mon présent
mon futur antérieur, mon conditionnel simple
un secret sans paroi où se love un serpent
un goulag où le froid le dispute à la faim
un domaine sans gloire où triment des vilains,
des braconniers honteux, mortifiés et sanglants
du sang de leurs femelles ouvertes à pleines mains
et de quelques bécasses abattues sur l’étang
un grenier où l’on dort en caressant le foin
doux comme la toison d’une jeune putain
un fief à ton vouloir d’y revenir enfin